lundi 17 octobre 2011

JC Trichet, le champignon vénéneux et le fédéralisme




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Champignon vénéneux
Ça a l'odeur et le goût du fédéralisme. Ça ressemble à du fédéralisme. Mais ça n'est pas du fédéralisme.

Sur le déclarant
Il est savoureux de voir cet énarque ancien administrateur représentant de l'Etat du Crédit Lyonnais au temps du trou abyssal qui fut creusé; cet ex-Président pantouflard de la Banque de France; cet obsédé de la politique de l'euro fort et ce névrosé de la lutte contre l'inflation à qui nous devons, tel qu'à la tête de la Banque Centrale Européenne qu'il préside, une fraction non négligeable de l'effondrement du PIB des Etats européens, comme du déficit du commerce extérieur; ce fossoyeur zélé de la Grèce à travers les plans d'austérité intenables qu'il contribue à imposer; cet insupportable donneur de leçon de bonne gestion monétaire qui aura passé son mandat à mépriser la souveraineté des Etats comme la légitimité des dirigeants européens; ce technocrate qui a contribué, puissamment, à dessiner le destin de la Nation et celui de l'Europe à la tête de la BCE sans pourtant disposer de la moindre légitimité démocratique, puisque par mode de désignation, son fauteuil n'en relève pas- voir suggérer, si ce n'est proposer un dispositif de surveillance des politiques budgétaires des Etats membres. Ce qui ressemble fort à un type de pouvoir de nature fédérale.

Sur le fond
Car en effet, vouloir contrôler la politique budgétaire des Etats revient bien à réaliser, de fait, une convergence budgétaire. Mais qui ne dit pas son nom. Pire, qui ne se place d'emblée que sous l'angle de la "sanction" économique. Or une convergence budgétaire est un acte positif. D'un gouvernement fédéral par exemple. Ou d'une organisation qui s'apparente singulièrement au fédéralisme.

Que va-t-on contrôler? 
Les dérapages au regard du pacte de stabilité existant? Alors tous les Etats sont sûrs de devoir payer des amendes. Voire pire. Sans que la situation de déséquilibre de certains Etats (dont la France, car contrairement aux propos de l'intéressé, la Grèce n'est pas le seul Etat "vagabond") change en quoi que ce soit. Tout en renforçant l'euroscepticisme et les tensions aujourd'hui très préoccupantes. 

Qui va contrôler? 
Une instance technocratique, ou l'émanation d'un quelconque Conseil ou d'une quelconque Commission, si haute soit-elle. Voire les trois. D'un mot, rien qui soit investi d'un pouvoir de nature démocratique. L'Europe administrative, aveugle, non politique dans toute sa splendeur, aux commandes pourtant du pilotage budgétaire de tous les Etats membres. Voilà ce qui nous est proposé. 

En réalité, JC Trichet utilise une rhétorique fédérale à travers la thématique de la nécessaire convergence budgétaire, pour mieux suggérer une Europe désinvestie politiquement, au détriment de la souveraineté des Etats et de leurs dirigeants et du respect des peuples et des citoyens, au profit d'un mécanisme supranational administratif et déresponsabilisé, sans la moindre trace de légitimité, n'ayant qu'une seule fonction stérilisatrice de l'économie: l'administration de la sanction. 

Las! Tout le débat est là: il faut bien discuter, et vite en effet, du fédéralisme comme réponse, adaptée ou non le débat citoyen devra(it) le dire, à travers une politique budgétaire commune, aux déséquilibres induits par les difficultés rencontrées par certains Etats. Changer les Traités existants pour accoucher d'un mécanisme de contrôle et de sanction budgétaire des Etats n'a aucun sens et n'empêchera aucun dérapage d'un Etat. Pire, voilà qui le handicapera encore davantage. Au détriment de tous. 

JC Trichet propose en réalité de maintenir la juxtaposition artificielle des Etats, celle-là même qu'a constituée l'Euro, à travers le simulacre d'une convergence budgétaire dont la sanction économique serait la garante. Aucune Europe renforcée n'en sortira. Aucune zone euro n'en sera consolidée. Le fédéralisme implique la convergence budgétaire. On peut y adhérer ou pas. La réponse aux déséquilibres est sans doute là. Avec une nouvelle approche de la solidarité européenne. Mais le débat est politique et en aucun cas administratif. Il appartient aux citoyens ou à leurs élus d'en débattre et d'arbitrer. Pas à des technocrates qui n'ont fait que creuser la tombe des entreprises où ils sont intervenus, ou celle des Etats, qui se sont par ailleurs trouvés dépossédés de leur politique monétaire. 

Si les Traités en cours doivent être modifiés, Monsieur Trichet, c'est pour réhabiliter la place du politique au plan Européen, peut-être en effet à travers le fédéralisme et son bras armé, une politique budgétaire européenne. Mais certainement pas pour renforcer une Europe monétaire et administrative qui est un échec patent, dont le développement que vous proposez serait à la fois une excroissance vectrice de nouveaux déséquilibres économiques, et un nouveau coup porté à une identité européenne déjà vacillante, faute d'avoir été politiquement construite.


Post Scriptum

On rappellera que le Président de la BCE a fait partie de la promotion Thomas More de l'ENA. Thomas More, le père de ce joyau de sciences politiques qu'est "Utopia", s'agissant de rechercher un ordre politique au service de la liberté, dans le respect et la tolérance, contre les violences notamment économiques qui ravagent la vie des peuples. 
Le fédéralisme est bien une "Utopie" en ce sens là, Monsieur Trichet. Mais fort éloignée de l'Europe cadenassée par les traités liberticides et économiquement intenables autant qu'indéfendables que vous appelez de vos veux.

Citoyens européens, prenez garde aux champignons vénéneux!



Capture d'écran du site lemonde.fr



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