mardi 8 novembre 2011

Crise européenne: retrouver les vertus de la lucidité et celles d'un optimisme raisonnable



Le sommet européen des 26 et 27 Octobre était présenté comme celui "de la dernière chance" pour la zone euro. Tout comme le G20 qui l'a suivi de près, dont l'ordre du jour fut dicté par les circonstances, s'agissant du sort de la Grèce et de l'Italie au premier chef, la France étant épargnée (Mais en apparence seulement, comme l'atteste le plan de rigueur qui a suivi, à 48 heures, la clôture du sommet de Cannes. Et uniquement parce que la France assumait la Présidence et était le pays organisateur, ne nous y trompons pas).


La dernière heure avait sonné. La dernière chance avait été saisie. Le cours des choses allait être modifié dans le bon sens à la faveur d'un esprit de responsabilité, cela va de soi. On avait accordé à l'évènement, aux évènements, la dimension médiatique qui semblait devoir s'imposer (mais cela s'imposait-il?) par les apparitions télévisées ad hoc, le Chef de l'Etat assurant personnellement et par deux fois un service après-vente démocratique (et surtout politique) minimum. 

A ceci près que. 

A ceci près que l'encre des procès-verbaux du premier sommet n'était pas même sèche que la Chine manifestait par la voix de ses représentants un enthousiasme des plus mesurés pour ce qui était d'investir en Europe en général et via le FESF en particulier. Et infligeait une sévère douche froide à l'enthousiasme présidentiel dont on est fondé à se demander s'il en avait bien mesuré la portée et l'incidence comme la suite de l'histoire le révéla.


A ceci près que moins de 4 jours après le Sommet européen qui était censé avoir ramené l'ordre (l'obéissance?) économique dans la zone euro, la Grèce, par la voix de son Premier Ministre, dans un bel exploit démocratique s'agissant de valider un plan aux enjeux considérables, décidait de soumettre le précieux accord au peuple souverain par référendum. Et sinon reprenait sa parole, du moins hypothéquait temporairement pour de légitimes raisons ailleurs ce qui avait été dit et décidé ici, créant une tension politique rarement égalée en Europe, cette dernière menaçant rien moins que de se briser net sur la revendication grecque, contraignant l'Allemagne et la France à faire montre d'une brutalité sans précédent en matière diplomatique pour emporter la soumission grecque aux exigences budgétaires européennes en contrepartie du financement de 8 milliards d'euros annoncé.


A ceci près que le bel ordonnancement programmé du G20 de Cannes des 3 et 4 Novembre qui devait être centré sur les transactions financières et marquer un retour en force des voies à explorer pour retrouver le chemin de la croissance et de la solidarité entre une Europe re-stabilisée il y a peu et des Etats-Unis soucieux de leur puissance et de leurs débouchés- ce bel ordonnancement donc, s'est trouvé renversé par la question Grecque. 

Quasiment tout le sommet aura été consacré à l'issue du bras de fer engagé avec Papandréou pour obtenir la reddition sans condition de la Grèce, sans référendum donc, quitte à ce qu'elle soit payée du prix de l'humiliation d'un dirigeant légitime, ce qui fut fait par la voix de l'Allemagne, en échange des sommes promises. Reddition accompagnée de la validation inconditionnelle là encore de la mise sous tutelle d'Athènes au moyen de la présente permanente de trois représentants de la Troïka. Mais l'Italie aussi allait connaître son heure de gloire dans ce sommet de la dernière chance, avec une double tutelle du FMI et de l'UE, ce qui n'était pas prévu mais qui s'est imposé, le programme de 15 pages remis par Silvio Berlusconi visant à créer les conditions du financement de la dette de 1800 milliards d'euros de son pays ne convenant ni aux instances en question, ni et surtout aux marchés.

De gouvernance financière mondiale pourtant vitale par rapport à la crise en cours, de taxation financière, de chemins de la croissance, et surtout de dévaluation du Yuan, sujet capital pour l'économie mondiale, on ne parla point. Ou si peu pour un nombre fort limité de ces matières.    


A ceci près qu'aujourd'hui, moins de 8 jours après l'annonce du caractère décisif de l'avancée européenne, et après qu'on ait présenté l'accroissement de la dotation du FESF à hauteur de 440 milliards pour un effet de levier de 1000 milliards d'euros, le dispositif constituant la pierre angulaire d'une Europe rassurée et surtout apte à faire face aux crises de ses banques comme aux difficultés passagères des Etats, on voit confirmé, mais on l'avait bien noté tant l'imprécision était grande, le fait que rien n'est réglé s'agissant du FESF. ON travaille sur des "hypothèses" et non sur des "plans". Autant dire sur rien de concret encore.

Ses modalités de constitution autant que d'intervention ne sont toujours pas fixées. Car qui dit effet de levier dit monétisation. Et donc mise en oeuvre de mécanismes d'ingénierie financière identiques à ceux qui avaient engendré la crise des subprimes de 2007/2008 et la crise subséquente de l'économie mondiale. Or comment se sortir de là lorsqu'aucun Etat européen n'a les moyens de faire une dotation en cash à due concurrence des montants requis (et déjà insuffisants)? Et si  on opte pour un système de garantie, on voit bien la difficulté qui surgit, celle du prêteur de dernier ressort qui va provoquer un découpage de la zone euro entre les Etats selon le critère de leur niveau d'endettement. 

On avait opté le 27 Octobre pour un FESF redimensionné, et voici que dans les faits, malgré les annonces rassurantes de JC Junker, rien n'est opérationnel, le projet buttant sur les modèles économiques ou politiques qui sous-tendent la concrétisation de ce FESF puissant. 


De "dernière chance" effective, point donc dans cette crise de l'euro et dans sa gestion, de Sommet européen en G20 . 


Car à l'épreuve des faits, rien de ce qui était prévu n'aura été abordé en totalité; rien de ce qui aura été abordé et décidé n'aura tenu, avec une durée de vie de quelques jours seulement s'agissant de décisions présentées comme définitives; rien de ce qui aura tenu n'est pérenne, parce que buttant sur une sous-estimation des enjeux en termes techniques ou de modèle politique, ou de réalité démocratique.


A propos de ces décisions survenues dans le cadre de "la dernière chance" pour la zone euro, on parlera plus prudemment et de façon plus réaliste "d'avancées", mais se gardant bien de statuer sur le "progrès" qu'elles incarneraient, tant leurs vices et carences originels sont patents: traitement des effets et non des causes; sous-dimensionnement et imprécision des dispositifs financiers; sous-estimation voire négligence de l'impact démocratique des plans venant en conséquence des décisions et donc hypothèque posée sur la stabilité de la zone euro; déstabilisation induite des exécutifs légitimes européens, les décisions n'étant adoptées qu'au prix de démissions de ces derniers et d'une instabilité politique intérieure des plus préoccupantes dans les Etats concernés; entrée en force comme acteur politique à part entière au sein de la zone euro de puissances économiques ayant déjà affirmé qu'elles allaient exiger des contreparties sérieuses dont on sait qu'elles ne se limiteront pas à la garantie financière, mais empiéteront sur le modèle économique et social européen, ce qui n'ira pas sans conséquence; confirmation de l'emprise directe des marchés sur le processus de décision politique et d'adoption démocratique, ce qui en raison même de leur approche volatile, n'augure favorablement ni des chances de réussite, ni a fortiori de la pérennité des décisions, le temps des marchés n'étant pas le temps de la construction économique et politique européenne, etc.


On est ici dans tout sauf dans une logique "de la dernière chance", le Sommet européen comme le G20 ayant créé beaucoup plus d'interrogations et d'hypothèques qu'elles n'en ont levées. 
Il faudra donc encore d'autres "dernières chances" qui n'auront elles aussi de cette dimension fatale et unique  que l'aspect, sans en être pour autant. 


Les citoyens autant que les observateurs le pressentent ou le voient bien, au regard même de la fragilité extrême de l'édifice européen ainsi construit (rien n'est moins sûr qu'il faille de nouveaux financements - les euro-bonds, on y revient, mais pour environ 2000 milliards, car c'est le bon ordre de grandeur, et non pas 1000 Mds d'€; une nouvelle approche de la dette - mutualisée cette fois-ci, véritablement-; une nouvelle légitimité démocratique - une constitution européenne, comme les britanniques le soulignaient hier dans le Guardian, dans un savoureux élan de lucidité européenne); au regard de la violence des répliques au demeurant immédiates (financières, démocratiques); de la puissance des remises en cause (la place de l'Allemagne dans cette Europe là), et par extension, au vu de tous les nouveaux déséquilibres surgis lors de et à la faveur de ces deux tentatives de stabilisation, ratées il faut le souligner, de la zone euro frappée par la crise que nous lui connaissons. 


Faut-il pour autant céder au pessimisme malgré la limite de ces deux tentatives de stabilisation ratées; malgré l'extrême gravité de la situation économique, politique et sociale de la zone euro; malgré l'ampleur de la crise qui n'est ni endiguée, ni résolue (sauf à se transformer en communiquant, et cela seul pour l'affirmer), mais déployée encore un peu plus vite vers un terme qui n'est pas écrit toutefois, en raison même de la dimension systémique du chaos actuel? 


Rien n'est moins sûr. Prenons encore quelque recul.


Depuis combien de temps présente-t-on des sommets, des réunions, des conférences internationaux, toutes instances confondues, comme étant ceux "de la dernière chance" au regard de l'importance de la crise (de n'importe quelle crise) en cours?


Sans doute depuis aussi longtemps qu'on tient de telles réunions. C'est à dire depuis toujours. Même si l'échelle de l'humanité a cru en même temps que sa population. Même si les sociétés ainsi que les formes civiles, économiques et/ou politiques de sociétés se sont différenciées, complexifiées dans des proportions très importantes, jusqu'à représenter parfois des fractions considérables de cette humanité. Même s'il existe une variété (il faudrait dire une richesse, tout simplement parce que l'histoire humaine avance de façon dialectique) presque infinie, ne serait-ce qu'en termes de de types de crises, et ce bien qu'on retrouve d'évidentes constantes dans les structures comme les mécanismes de ces crises.


D'où l'importance des enjeux lorsque désordres et déséquilibres graves il y a, puisque telle est la définition formelle d'une crise. 
Ce qui est bien le cas aujourd'hui de la crise de la zone euro, de façon non extensive, à la fois financière, économique, politique, institutionnelle, sociale, et même morale. Un modèle de crise totale.


Crise plus que prévisible néanmoins pour qui avait regardé avec lucidité, la dimension économique, monétaire et financière de la construction européenne en profond déséquilibre d'avec son intégration politique et institutionnelle; la dimension politique en déséquilibre d'avec les peuples comme les citoyens eux-mêmes et les forces démocratiques; la dimension économique en déséquilibre d'avec ses dimensions "politique" et "morale" considérées en termes de valeurs (le déficit patent de solidarité qui se venge à présent de façon cruelle à travers la crise systémique de la dette); la dimension marchande (par adhésion à et réalisation de la mythologie présentée comme un paradigme économique, du "Grand Marché") en déséquilibre d'avec la dimension sociale; la dimension politique encore en déséquilibre d'avec les forces de certains acteurs économiques devenus exponentiellement puissants dans une économie mondialisée. 


Où l'on voit qu'il y a en définitive autant de déséquilibres qu'il y a de dimensions de la construction européenne qui entrent en tension. Ce qui atteste de façon criante l'absence de cela seul qui aurait permis une intégration plus harmonieuse, même si imparfaite, parce que plus soucieuse des équilibres entre les composantes: la dimension politique.


Autant de déséquilibres donc, mais aussi autant d'opportunités de construction pour autant qu'on examine sans complaisance les mécanismes du chaos qui a ainsi surgi. 


Voilà pourquoi il est absolument incohérent de parler d'un quelconque sommet "de la dernière chance" pour l'Europe. Non seulement parce qu'aucun des deux derniers ne l'a été, n'emportant rien de définitif comme nous l'avons démontré, et soulevant plus de questions qu'apportant de réponses. Mais aussi parce que c'est dans la confrontation constante et permanente à ces déséquilibres là, et à leurs successeurs, que se crée la dynamique européenne elle-même. Même si le prix payé est considérable qui pourrait être minoré si l'on avait le courage politique des nécessaires avancées sur ce terrain.


Considérons ce qui suit s'agissant de l'Europe: après l'échec retentissant de l'adoption du Traité constitutionnel européen en 2005, et l'adoption du kafkaïen et jésuitique Traité de Lisbonne qui a pris sa place, qui aurait pensé que l'Europe fédérale serait revenue prochainement au centre du débat? Bien peu de monde. Or à présent que l'Europe est au bord du gouffre, que les replis nationaux sont criants, que la Grèce a failli sortir de la zone euro, que l'Allemagne prend une position très contestable et de plus en plus ouvertement contestée de leader hégémonique de l'Europe, lors même que la solidarité européenne donc semble avoir volé en éclat sous les coups de boutoir des marchés qui n'attendaient que cela tant la construction était imparfaite, le fédéralisme refait surface avec une énergie inconnue jusqu'alors. 


L'idée du fédéralisme pour l'instant. Même controversée, même en cause dans son extension. Avant la réalité du fédéralisme, souhaitons-le. L'histoire, par la puissance et l'ampleur de la crise européenne totale, universelle même, force ici à se poser la seule question qui tienne, sans cesse contournée et évitée: moins d'Europe ou plus d'Europe. Mieux encore: plus d'Europe du tout ou une Europe fédérale?


Car pour la Grèce la question s'est posée ainsi la semaine passée. Elle va se poser de la même façon avec l'Italie une fois que Silvio Berlusconi en aura terminé avec son agonie politique et quel que soit son successeur, par le simple fait que Rome est désormais sous tutelle économique. Malgré le plan de rigueur de François Fillon, la France, dont tous les fondamentaux sont au rouge, quand bien même elle atteindrait l'objectif des 3%, pourra difficilement rester stable politiquement la question européenne s'imposant alors avec la même violence qu'ailleurs. Pourquoi en irait-il autrement?

Ce fédéralisme qui ne parle pas que de transfert de compétence budgétaire ou fiscale, mais aussi de solidarité, celle là même qui est au coeur de la crise actuelle par son absence, et au centre de son avenir par projet pour peu qu'on lui accorde la place qui doit être la sienne, ou plus exactement qu'on reconnaisse la nécessité qui est la sienne sous peine d'un naufrage collectif et définitif du continent européen.


Alors l'histoire ne crée que des impasses dont nous seront à même de sortir. Elle ne crée que des chaos dont nous pouvons tirer un nouvel ordre. Elle n'impose que des apories dont un logos politico-économique éclairé permet de s'affranchir. Sans pour autant qu'il soit nécessaire, comme le pense JP Dupuy, de caractériser ce chaos jusqu'à l'insoutenable. Nous n'en sommes guère éloignés néanmoins par ce qui advient. Mais suffisamment toutefois, comme le pense Edgar Morin, pour que la probabilité du chaos politique, économique et social européen, fasse apparaître en même temps, dialectiquement, la probabilité de l'issue. Issue qui ne peut être que fédérale, c'est par trop évident.

Nul ne sera donc dupe de la nécessaire théâtralisation promues par les protagonistes lors des sommets européens qui conditionnent ainsi leurs partenaires de négociation et créent par le fait même les conditions d'une issue ou conclusion qui plus est attendue comme favorable. La pièce qui s'est jouée à Bruxelles puis à Cannes n'était pas, loin s'en faut, le dernier acte, fondateur d'un nouvel ordre, incarnant des sommets "de la dernière chance" au demeurant manquée.


Nul ne sera dupe non plus de l'effet catalyseur recherché en amont et en aval du sommet de crise, de la part des politiques à l'adresse de leurs opinions publiques, pour obtenir un assentiment qui, à défaut d'être de nature démocratique, permet de jouir d'une certaine "paix sociale" utile voire indispensable aux trains de mesures impopulaires qu'il s'agit de faire adopter des suites des décisions des sommets considérés. Si l'on en juge par les exemples grec et italien, l'histoire va beaucoup plus vite que ceux qui se croient et s'affirment dépositaire d'un pouvoir ultime face à ce qui serait un "moment ultime". 


Jamais l'Europe n'a été si profondément ni si gravement en crise. Et pourtant, jamais elle n'aura été aussi près de faire aboutir, si elle en a le courage politique, les idéaux universels et pertinents qui la fondent et la justifient. 
Le courage est ici aussi essentiel que la lucidité qui force à jouer la partie, pour une fois, avec "un coup d'avance". Les marchés eux-mêmes n'attendent que ça, qui spéculent avec une frénésie d'autant plus marquée qu'ils veulent souligner à quel point la navigation à vue des dirigeants européens sans projet cohérent, constitue un vecteur de déséquilibre grave. L'histoire en définitive, et ceci est vrai pour l'Europe comme pour n'importe quelle société humaine, ne propose pas de "dernière chance". Elle n'offre que des chances , la "fortuna", dont Machiavel pensait de la "virtu", comprenez le talent, la lucidité, la clairvoyance, qui caractérise le politique, qu'elle permet de les identifier comme telles. 


Et si, en dernier ressort, la puissance du chaos européen n'était pas tant ni seulement la résultante des "faits" (qui ne cessent d'émettre le même message), que celle d'une "virtu" absente ou insuffisante de la part des dirigeants européens eux-mêmes, qui ne veulent par regarder plus loin, suffisamment loin et suffisamment vite l'Europe qui mérite d'être construite. Mais les faits ont la vie dure. Qui ne cessent de "redonner des chances" précisément, contre la lecture réductrice des évènements de la part des politiques en termes de "dernière chance", parce qu'ils auront été "au pied du mur", faute d'avoir anticipé.


Mais on souhaiterait pour chaque citoyen européen, cela va de soi, que cette compréhension et l'action décidée et éclairée qui en découle, surviennent promptement, tant il est vrai que le chaos finit par se payer d'un naufrage social et humain impensable. celui là même que les indignés, partout et en nombre croissant précisément, pointent du doigt.


Non sans ironie c'est avec Marx que nous conclurons cette réflexion sur la nécessité de ne pas souscrire à une dramatisation artificielle autant que superficielle de la situation très préoccupante à laquelle l'Europe est soumise, tout en nourrissant, a contrario, un optimisme raisonnable lui même fondé sur une approche globale et lucide de la problématique globale de la construction européenne aujourd'hui menacée de toutes parts, à travers autant de déséquilibres qu'il y a de dimensions de cette construction. Le Marx de la Préface à l'Economie Politique, écrite en 1859:

"C'est pourquoi l'humanité ne se pose jamais que des problèmes qu'elle peut résoudre, car, à y regarder de plus près, il se trouvera toujours, que le problème lui-même ne surgit que là où les conditions matérielles pour le résoudre existent déjà ou du moins sont en voie de devenir."


Le chaos européen actuel n'est donc au fond que la matrice d'un ordre européen plus abouti qu'il reste à construire. De toute urgence. 
Nous savons sur quel plan: le fédéralisme. Qui est un projet et non pas une ligne Maginot comme celle que nous constituons avec les plans de rigueur de plus en plus draconiens qui se succèdent. 
Nous savons de quelle manière: par intégration des politiques économiques, budgétaires et fiscales. Avec les transferts de compétence que cela implique et la mutualisation des dettes. Le tout associé à une gouvernance financière et économique internationale sans laquelle l'Europe est condamnée à revivre sans cesse les mêmes crises. de façon aggravée.
Nous savons aussi les écueils dans lesquels il ne faut pas sombrer: une Europe à n vitesses qui ne seraient que la transposition politique de niveaux économiques de développement (les "cercles" appelés de leurs voeux par les allemands) associés à des niveaux d'endettement. On ne peut pas être "plus ou moins" européen parce qu'on est "plus ou moins" endetté. N'en déplaise à nos amis Allemands qui seront hélas demain en but à une grave crise économique, ainsi qu'à nos amis Britanniques dont l'exil intérieur européen est devenu plus qu'injuste aux yeux des autres Etats, et l'atlantisme économique plus que problématique quand il s'agit de faire front de façon commune.
Nous savons par référence constante à quelle valeur commune: la solidarité.
Nous savons pour faire face à quoi: à l'avidité des marchés et aux conséquences de l'imprévoyance comme de la cupidité, voire l'irresponsabilité (à neutraliser par la gouvernance) de nos propres acteurs financiers (nos banques); mais aussi au poids de la dette colossale accumulée au fil des années.


Il faudra également, fort d'une unité ainsi instaurée, contraindre la Chine a réévaluer le Yuan, ce qui n'est pas possible tant qu'on n'a pas fermement engagé ce qui précède, afin de rééquilibrer les relations économiques mondiales. Quitte à en passer par une dévaluation de l'euro qui, pour peser temporairement sur la charge de la dette, contribuera ensuite à un regain des exportations de la zone euro et donc de la croissance. Une saine croissance cette fois-ci, pas uniquement tirée par la demande intérieure de la zone euro (ce qui est aujourd'hui la cause de la faillite de l'Allemagne). Cette action pesant également sur le cours politique commun des nations, dont la Chine.


On voit bien la puissance et la fécondité de ces chantiers là. 

Qui a osé dire, pour de vils motifs politiciens, qu'on en était à "la dernière chance", alimentant ainsi un chaos que l'on prétend combattre, et sans pour autant oeuvrer pour le dépassement véritable de ces déséquilibres là, dont tout porte à penser, toutes analyses faites, qu'ils n'ont pas le dernier mot?

Tout est possible, amis européens. Parce que tout reste à faire, et non pas parce qu'on a tout essayé et que la crise est là! 




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