mardi 15 novembre 2011

Mario Monti ou la mort du politique


A en croire les médias autant que la remontée des places Boursières, après la tension extrême qui dure depuis le G20 de Cannes, et passée la phase de soulagement suite à la confirmation du départ de Silvio Berlusconi, place ce jour au rassurement donc avec la désignation de Mario Monti à la Présidence du Conseil italien. Mario Monti ou LA solution qui s'imposait. Mario Monti ou LE triomphe du raisonnable et surtout l'avènement de LA composante politique qui devrait ramener la prospérité à un Etat en plein naufrage. 


A ceci près que spéculation n'est pas raison. Qu'il est des données chiffrées qui forcent à tempérer les enthousiasmes comme les dénigrements, ainsi qu'à réhabiliter autant l'économie que l'image de l'économie italiennes. Qu'il faut se rappeler ce qui a permis l'arrivée de Monti pour qu'on ne voie pas ce qui devrait changer, sur le fond et durablement, avec ce nouvel acteur. 


A ceci près que pour la première fois dans l'histoire de la démocratie européenne, les marchés auront désigné directement un politique en foulant aux pieds les fondements et mécanismes démocratiques, et que ni Mario Monti ni qui que ce soit de politique ne pourra désormais résister à cette nouvelle forme d'exercice de l'autorité. Que la modalité selon laquelle Monti aura été investi constitue un enterrement de première classe pour le politique en Europe et peut-être même dans le monde, le pouvoir économique despotique des marchés s'étant désormais imposé en lieu et place de ce qui le précédait, rendant extrêmement difficile, sauf sursaut salutaire au demeurant indispensable des citoyens et peuples européens, une quelconque inversion de tendance. 



Ou l'on voit que l'analyse des faits avérés coupe court aux spéculations relatives à un prétendu talent intrinsèque de Mario Ponti tout comme à l'efficacité attendue de son action future.


Mario Monti réussira-t-il ou non à "redresser" l'économie italienne? 

Mais Silvio Berlusconi, quels que soient ses défauts, et une fois neutralisée l'écume des jours boursière, politique intérieure ou médiatique, n'avait que cela pour objectif tout au long des derniers mois, jusqu'au G20 et en conséquence de ce dernier, avec la bénédiction et même les félicitations, l'aurait-on déjà oublié, de ses partenaires européens et de la Commission Européenne! 


Economiquement, il ne s'en était pas si mal tiré que cela. Bien mieux que la France même, n'en déplaise aux commentateurs bien peu lucides. On rappellera par exemple que le solde primaire italien (avant imputation de la charge de la dette de 1900 milliards d'euros) est excédentaire. Il s'agit même du premier excédent européen, devant la France et l'Allemagne (Il est des vérités que le Président Sarkozy et la chancelière allemande auront, c'est évident, beaucoup de mal à reconnaître. Et pour cause!). La dette italienne est concentrée à 55% entre les mains d'investisseurs nationaux, ce qui constitue un facteur de stabilité. A titre comparatif, c'est plus de 65% de la dette française qui est entre des mains étrangères. La maturité de la dette italienne est à 7 ans, ce qui constitue une cycle long. La croissance italienne est identique à celle de la France pour 2010 et 2011, même contractée entre 0,7% et 1% pour cette dernière année (prévisions). Le taux de chômage est de 8,4% (2010) quand celui de la France est de près de 10% pour la même période selon les données de l'OCDE. Le taux d'épargne des ménages italiens en 2010 est d'environ 12% quand celui de la France est en effet de 16,8%, mais sachant que celui de la Grande-Bretagne est de...5%. 


D'un mot, les fondamentaux de l'économie italienne, celle de Berlusconi dont Mario Monti hérite aujourd'hui, sont sinon bons, à tout le moins viables. Même avec une dette de 120% de son PIB pour peu qu'elle soit financée à un taux raisonnable. Mais encore faut-il considérer ces grandeurs non pas du point de vue de l'instantanéité des marchés, mais de celui des grands équilibres économiques. 
Pour supporter sa dette et renouer avec la croissance, il manque seulement à l'Italie la confiance de marchés qui spéculent aujourd'hui contre elle, comme ils ont spéculé hier contre la Grèce et comme ils spéculeront demain matin (mais ils ont déjà commencé) contre l'Espagne et après-demain (mais la chose est commencée là aussi), contre la France.


La France elle, même avec une dette de 84,5% de son PIB (appelée à s'envoler jusqu'à 120% selon le FMI) est dans une situation beaucoup plus critique, tous ses fondamentaux étant au rouge: déficit primaire du budget, croissance atone et récession entamée, chômage pléthorique et en hausse constante, "spread" avec l'Allemagne se creusant en permanence sur le taux à 10 ans; climat des affaires gravement détérioré avec chute libre de l'investissement selon une note de conjoncture de l'Insee d'Octobre 2011, confiance des ménages en berne et recul de la consommation. 


Où l'on voit que si l'on accorde encore aujourd'hui à la France par exemple une confiance, toute relative et pour peu de temps encore, que l'on refuse à l'Italie, ce n'est pas pour des motifs rationnels sur le plan économique. 

Soyons direct: Bien qu'il ait mené une politique en tous points conformes aux exigences des instances et de ses amis européens, Berlusconi ne plait plus aux marchés. Ces derniers le font directement payer à l'Italie. Et lui imposent Mario Monti. Qui héritera d'une situation économique sur laquelle il ne fera que du saupoudrage et/ou du mécano budgétaire sans toucher en rien, au delà des effets d'annonce et des mesures symboliques, aux grands équilibres acquis. La maîtrise du principal facteur de déséquilibre, celui de la charge financière de la dette, ne relevant pas de ses compétences, mais de l'appréciation des marchés quant à son action de Président du Conseil.


Ce n'est donc pas Mario Monti qui va redresser ou pas l'économie italienne. La question de l'homme devenant désormais extrêmement accessoire. Ce sont les marchés eux-mêmes, selon le jugement qu'ils porteront dans la durée sur ce qu'ils estiment que doit être la conduite des affaires et des finances publiques italiennes. 


Les peuples démocratiques avaient jusqu'ici coutume de voter pour sanctionner l'action des politiques. Désormais, l'évènement inaugurant une ère nouvelle, vertigineuse et bien évidemment dangereuse, ce sont les marchés qui décideront, quel que soit l'avis des peuples, de ce qui est bien ou pas à la fois pour ces derniers et pour les Etats qui en sont pourtant l'émanation.  


Le suffrage qui s'exprimait dans un espace démocratique vient de laisser la place à une procédure managériale, arbitraire et despotique de désignation de "super-gestionnaires" de la part de marchés impossible à identifier et d'autant plus puissants et redoutables qu'ils sont polymorphes et sans cesse recomposés. Ou Mario Monti apparaît comme ce qu'il est réellement: un expert comptable élevé à la puissance 100 et oeuvrant à l'échelle d'un Etat qui ne dispose plus d'aucune légitimité politique mais procède uniquement de la force économique. 



Mario Monti parviendra-t-il à contenir la dette d'un Etat présenté de façon quasi unanime et néanmoins au mépris des faits comme imprévoyant et impécunieux?

Mais enfin, aucun homme ne peut à lui seul empêcher les effets pervers d'une construction monétaire et économique européenne parcellaire et inaboutie! A fortiori quand rien n'a été ni ne sera modifié dans le contexte économique avec le départ du Commandatore (Les déséquilibres dus au poids de dettes souveraines liées, car tel est bien le noeud du problème. Et son issue possible mais non envisagée aussi qui consisterait par exemple et entre de multiples options à mutualiser les dettes puis à les supporter au plan européen à travers une structure de defeasance); et surtout quand rien n'a été redéfini touchant aux règles du jeu (le pacte de stabilité; les règles de gouvernance financière mondiale brillant par leur absence ou leur laxisme) au sein de la zone euro.

Mario Monti est un économiste, pas un magicien. Seule une modification collective de ces fameuses règles du jeu permettrait à l'Italie, comme à tous les Etats européens, de retrouver une stabilité, une moindre exposition du fait de sa dette, et au final réduire son endettement.  Pas un énième plan de rigueur version transalpine. Or, et pour se concentrer sur le dispositif qui est au coeur de la résolution des convulsions économiques en relation directe avec la dette, si l'on en juge aujourd'hui à la fois par l'impasse technique et politique dans laquelle se trouve déjà le FESF pourtant insuffisant avec sa dotation théorique de 1000 millliards d'euros, voilà qui augure mal, très mal même, du nécessaire ballon d'oxygène dont ont besoin tous les Etats.  

Si le FESF avait été opérationnel, Berlusconi n'aurait sans doute pas été démis, car l'Italie y aurait fait appel à la fois pour sa dette cumulée et pour ses besoins à court ou moyen terme. Mais les marchés se moquent comme d'une guigne du FESF, tant que les Etats continuent à payer, même si c'est au prix d'une austérité sans précédent qui détruit le tissu social et économique.  

Dès lors comme la politique européenne est toujours en retard sur les catastrophes, en désignant Mario Monti, les marchés se couvrent pour pouvoir continuer à spéculer sur la dette italienne le temps que les dirigeants européens mettent en place, s'ils le font un jour, une organisation qui viabilisera l'ensemble de la zone par prise en charge concertée et globale de la problématique des dettes souveraines. On parle ici d'environ 3000 milliards d'euros. Bien loin de la dotation originelle du FESF. Le défaut de gouvernance par incapacité de prévoir et d'anticiper, toujours.

Dans l'intervalle, les marchés se contenteront de Mario Monti, sauf à ce qu'instabilité intervienne sous son mandat. Ce que Berlusconi n'a d'ailleurs, avec beaucoup de lucidité, pas exclu...
On ne saurait  trouver de manifestation plus flamboyante de l'asujettissement de la fonction politique à la fonction économique. Mario Monti n'est pas désigné pour servir politiquement l'Italie, les marchés s'en trouvant par après rassérénés et donc favorisés dans les opérations, mais pour servir les intérêts économiques immédiats des marchés construits autour de et sur l'Italie et sa dette souveraine. 

Mario Monti ou le politique réduit à l'état de mandataire en contrat à durée déterminé ayant pour mission d'assurer la pérennité des opérations fnancières spéculatives par émission de signaux budgétaires rassurants. On est très loin d'une économie mise au service des peuples,  le politique tirant sa légitimité de sa capacité à faire bénéficier le tout d'une économie la plus prospère possible. Mario Monti ou le symbole d'un système pervers.


Pourra-t-il restaurer la crédibilité de la parole italienne sur le plan économique?


Mais à qui fera-t-on croire que le visiteur du Quirinal d'un certain jour de Novembre, démissionnaire, a pu "mentir" à qui que soit durablement alors que les agences de notation scrutent les moindres décisions de chaque exécutif et les comptes de chaque Etat; que tous les chefs d'Etat et diplomates européens connaissent les moindres faits et gestes de leurs homologues; que la Commission a le pouvoir d'enquêter, d'exiger la communication et la transparence des comptes publics, pouvoir qu'elle a bien évidemment exercé à l'égard de l'Italie de Berlusconi?


Comme si l'on pouvait suspecter ce dernier, quelque sévérité qu'on ait pour le personnage, d'avoir délibérément occulté quoi que ce soit ou sous-estimé les mesures à prendre alors la Commission avait validé il y a quelques jours à peine, son plan pour que l'Italie retrouve le chemin de la croissance et trouve le moyen de financer sa dette! 


La crédibilité de la parole italienne sur le plan économique n'a pas à être restaurée pour cette raison simple qu'elle n'a jamais été objectivement ni réellement entamée, malgré la tourmente du moment. Puisque tous les acteurs économiques et politiques, sans aucune exception, savaient de quoi il retournait. 


Les marchés auront beaucoup plus simplement, avec la plus totale complicité des instances européennes, de la BCE, du FMI, exploité à l'encontre de Berlusconi la théorie du bouc-émissaire afin de s'assurer un contrôle et une emprise opérationnelle définitifs d'ordre économique prévalant sur la souveraineté de l'Etat italien.


Mario Monti ne saurait détenir un quelconque pouvoir magique hérité de la technicité économique qui est la sienne et qu'on ne cesse aujourd'hui de mettre en avant. Sa parole importe peu en réalité. Puisqu'il n'est là désormais que comme émissaire et porte-parole des marchés, rassurant ces derniers sur la bonne exécution budgétaire et politique des décisions arrêtées ailleurs sur ce qui est bon pour l'Italie.  

Sera-t-il en mesure d'inspirer suffisamment confiance pour que le taux des obligations à 10 ans de l'Italie revienne largement sous la barre des 7% (après un record historique à 7,48%), et plus précisément aux 5% attendus par les marchés  pour que la dette souveraine redevienne supportable économiquement?  Pour que le "spread" (l'écart de taux) entre l'Italie et l'Allemagne décroisse? 


En réalité ce n'est plus ainsi que la question doit être posée! Il va falloir s'y habituer. Ou pas précisément.

En désignant Mario Monti, les marchés viennent de s'auto-rassurer. Puisque ce dirigeant politique va faire ce pour quoi non pas le peuple italien, mais les marchés qui l'ont adoubé, lui, le gestionnaire rigoureux et avisé: comprimer un peu plus les dépenses prévues au Budget, accroître les recettes par augmentation de la pression fiscale et sociale (peu importe le "détail" - le dosage entre effort des ménages et des entreprises; les conséquences en termes de protection sociale-  à ses mandataires au fond, pourvu que les mesures "passent" sans désordre social majeur, et contribuent à la viabilisation du remboursement de la dette). Il est toujours rassurant d'avoir un "homme à soi" dans la place n'est-ce pas?  

Dès lors, rassurés par cette mainmise gageons que les marchés vont ramener les taux à ce qui est attendu. Ce qui ne sera à aucun moment imputable à une quelconque "parole politique" de Mario Monti, mais à l'expression du contentement des marchés pour ce qui est d'avoir ôté au pouvoir politique la source même de sa puissance. Avant la Grèce mais plus encore avant l'Italie du mois de Novembre 2011, la source de la "puissance" politique était le suffrage et la volonté dont elle procédait. Après, les marchés eux-mêmes sont devenus à la fois l'origine, la fin, et le moyen du pouvoir politique. A tel point qu'il est sans doute désormais inadéquat de parler de "pouvoir politique". A présent, les marchés sont le "souverain". Il est des principes et paradigmes à l'aune de la disparition desquels toute discussion sur les éventuelles "compétences" d'un dirigeant deviennent singulièrement dérisoires!

Sauf à ce que les politiques décident, sous la pression des peuples sans doute, de reprendre la main. Par exemple en redonnant à la construction européenne la nécessaire dimension de solidarité qui devrait la caractériser.
Mais il semble bien qu'on aille dans un sens opposé à celui-là, pour le moment du moins. Il n'est que de considérer l'agitation diplomatique de l'Allemagne qui, après avoir imposé un ultimatum à la Grèce; puis fait perdre à la Grèce comme à l'Italie leur souveraineté en leur imposant à demeure des représentants de la Commission, de la BCE et du FMI; puis encore désigné aujourd'hui, franchissant le pas ultime, un dirigeant en naturant de façon totale la nature et les finalités de son pouvoir-  oeuvre sans relâche pour une modification immédiate des traités européens visant, pour les motivations avouées, à doter l'Europe d'un mécanisme permanent de gestion des crises financières, et pour celles qui le sont moins, à instaurer une Europe non plus à géométrie variable ni même à "n" vitesses, mais une Europe recentrée sur des Etats économiquement forts, quitte à exclure de façon automatisée les plus fragiles, au mépris de la dimension même de la construction européenne. 
Romano Prodi, économiste et dirigeant rigoureux, diplomate modéré et européen convaincu et impliqué s'il en est, s'est ému publiquement aujourd'hui même de cette tentation franco-allemande. Qui n'est en réalité et sur le fond que la résultante de la dépossession du pouvoir du politique par les marchés dont Mario Monti est devenu la funeste incarnation.


Les compétences de Mario Monti sont-elles le gage de la réussite de son action à venir?

Comme si la confiance en un seul homme, fut-il compétent et reconnu, pouvait à elle seule pour l'Italie ce que la France par exemple est strictement incapable de réaliser en ce moment même, malgré l'annonce par le Premier Ministre F. Fillon le 7/11 d'un plan de rigueur sans précédent, son spread avec l'Allemagne restant démesurément élevé, à 1,70% (170 points) pour le taux à 10 ans!

On voit bien avec l'exemple français que l'annonce et la mise en oeuvre de décisions budgétaires pourtant draconiennes ne suffisent pas à rassurer les marchés qui veulent plus. Plus, c'est  à dire très exactement l'absorption totale de la fonction politique et sa dissolution dans la fonction économique.

Ainsi si Mario Monti a une quelconque chance de faire aboutir sa future action de retour à l'équilibre politique intérieur, de stabilisation et de décrue de la dette en même temps que de réamorçage de la croissance italienne, de crédibilisation de l'Italie sur la scène internationale, ce ne sera pas par la seule vertu de ses compétences, celle de sa connaissance technique des rouages européens et internationaux, ni par celle de son entregent à la fois américain et bruxellois. Ca ne sera pas davantage en vertu de la légitimité que lui confèrerait sa carrière d'économiste sorti de Yale qui plus est ancien élève d'un certain James Tobin prix Nobel d'Economie de son état, et d'ancien commissaire européen épris de rigueur et d'équilibre des finances publiques.

Comme si l'excellence technique ou la probité politique, affichée ou réelle, de bon nombre d'acteurs de la BCE, de l'Eurogroup, de la Commission Européenne, du FESF, du Conseil, avaient empêché quoi que ce soit à la survenance de la crise de la zone euro et même à la crise aiguë et historique que cette dernière a connue, jusqu'à la limite de l'explosion au lendemain du sommet des 26 et 27 Octobre et pendant le G20 de Cannes!

Mario Monti ne réalisera pas à lui seul pour l'Italie un prodige que tous se sont révélés incapables de réaliser.
Il faudrait pour cela la gouvernance financière que nous avons déjà mentionnée, dont l'essence n'est pas la sanction tant désirée par les Allemands, mais la contribution dans la solidarité ainsi que la régulation. Toutes choses actuellement absentes de la scène mondiale.

Maintenant s'il réussit, mais au regard de tout ce qui se précède, faudrait-il réellement se réjouir d'un tel succès compte-tenu de ce qu'il présuppose?- ce sera parce que le pouvoir politique ayant été vidé de sa substance, les marchés seront parvenus là où ils voulaient, une emprise économique absolue et universelle, prélude italien à une ère nouvelle et très inquiétante dans laquelle le politique sera devenu l'instrument de l'économique.  
L'ordre des choses, celui des biens, celui des monnaies, celui des flux, prenant alors le pas sur celui des personnes, des peuples, des citoyens et des Etats.

La compétence de Mario Monti sera alors devenue au dernier degré le symbole définitif de la mort du politique. 

La France, l'Allemagne,  l'Europe, le Monde ont observé l'Italie toute le long de la semaine passée, après avoir observé la Grèce durant toute celle d'avant. A Bruxelles au mois d'Octobre puis au G20 de Cannes début Novembre, les marchés ont montré qu'ils faisaient de la politique, qui plus est très efficacement.

Avec Mario Monti, les marchés viennent de prouver qu'ils avaient conquis la puissance absolue qui ne se partage ni ne se divise: la souveraineté.
Avec ce gestionnaire si apparemment rassurant (mais pour qui?), un ultime rempart vient de s'effondrer. Les politiques viennent de renoncer à eux-mêmes comme à ce qui constituait pourtant leur raison d'être. Ont-ils seulement envisagé que la survenance de ce choix dans ces circonstances spécifiques rend caduque l'idée même d'élections, d'expression du suffrage. Qu'il instaure une forme post-moderne et inédite de tyrannie au regard de laquelle les avatars historiques de cette dernière sont de bien pâles préfigurations.

Faute d'avoir assumé la fonction politique comme elle devait l'être, à savoir par la prévision et la gouvernance, on aura sacrifié l'essence du politique: l'exercice du pouvoir au service d'une communauté humaine. Celle-ci, européenne et bien au-delà, Obama se trouvant à présent menacé dans des termes très voisins et pour les mêmes raisons, se trouvant désormais assujettie à un ordre économique finalisé par le profit et à des acteurs, les marchés, ne se justifiant plus à leur tour que par eux-mêmes. 

Avec Mario Monti le politique est mort.

Sauf à ce que les peuples se réapproprient la chose politique. Pour cette simple raison que, l'homme étant un animal politique, il ne lui est absolument pas accessoire que la communauté et les cercles communautaires dont les plus essentiels auxquels il appartient contribuent à la valorisation de soi et du bien vivre ensemble. Toutes dimensions de l'existence collective des peuples qui ne se réduisent pas à la capacité qui est la leur d'honorer des dettes contractées auprès d'acteurs amoraux, avides et cyniques. Les Italiens semblent à la fois soulagés et sans illusions.  Mais qui en entretient? 

Et si l'impasse dans laquelle cette désignation va certainement placer l'Italie et nombre d'autres Etats à sa suite devenait, dans quelques temps, une fois que Mario Monti aura été désavoué par ses maîtres d'aunjourd'hui, car cela viendra inévitablement après l'Islande, la source d'une renaissance du politique?





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